Commission Culture et Patrimoine de la Fédération Française de Cyclotourisme

Collection "MÉMOIRE LITTÉRAIRE DU CYCLOTOURISME" - Opus 4
Version numérique

Paul CURTET - Par les routes et les chemins...

photo des Hauts de Montaud
Les Hauts de Montaud
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4 - EZY ET MONTAUD
(1965)

     Le plateau d’Ezy est un de ces lieux les moins connus des environs de Grenoble. Pendant longtemps il a été desservi par de simples sentiers, et plus tard par une route atroce, à peine roulante. C’est seulement depuis quelques années que cette route a été améliorée et goudronnée.
     Chose curieuse, c’est avant l’ère de l’automobile que l’endroit a été le plus fréquenté. En ces temps lointains, on prenait le tramway jusqu’à Noyarey, à onze kilomètres de Grenoble. De là, il suffisait de deux heures de marche pour arriver au village d’Ezy. Et les piétons étaient suffisamment nombreux pour faire prospérer le café- restaurant.
     Actuellement, il faut prendre la N.532 et remonter la vallée de l’Isère jusqu’à Noyarey, puis emprunter la D.74 qui, en sept kilomètres, mène à Ezy, à environ 900 mètres d’altitude. La pente est très forte (à peu près 10% de moyenne). La vue, d’abord limitée, s’ouvre subitement vers le Sud, la vallée de l’Isère et les grandes Alpes, ou encore, au hasard des lacets, vers l’Est et la Chartreuse. On aperçoit alors le village de Mont-Saint- Martin, qui occupe sur sa haute terrasse de l’autre côté de l’Isère, une situation exactement symétrique de celle d’Ezy.
     Un peu avant le terminus de la route, il y a une grande prairie dominant un admirable panorama sur Belledone et l’Oisans. C’est un de ces coins où, lorsqu’on y passe, on formule le vœu de s’y établir, loin de la vaine agitation du monde. Et pourtant il n’y a pas la moindre résidence secondaire, et ceci à vingt kilomètres de Grenoble. J’ai su que les paysans se refusaient à vendre. Avant la guerre, il y avait eu quelques ventes de terrain «pour un morceau de pain» en des endroits moins bien situés, et où se dressent en effet quelques chalets. On peut parier que la surenchère aura bien raison de cette Bastille.
     Ezy n’a pas d’agglomération, mais seulement quelques maisons disséminées çà et là. La route aboutit au café-restaurant, admirablement placé avec sa grande terrasse. On y voit la Meije, Grenoble, et, la nuit, les lumières de la ville. On peut y prendre un casse-croûte, mais non un repas complet, car le propriétaire est un homme seul et âgé, qui vous fera aisément des confidences. Ses parents tenaient le café avant 1914, et il me confirma qu’on y voyait plus de monde que maintenant avec la route goudronnée. Lui- même, avant la dernière guerre, avait souvent vingt cinq pensionnaires. Il en eut même qui étaient venus étudier un projet de route reliant Ezy à Montaud. Ce projet n’eut pas de suite, mais il pourrait bien être réalisé prochainement.
     En attendant, on va à Montaud par un sentier assez facile, nécessitant à peine le portage du vélo. Le point culminant du passage est à près de 1000 mètres. Il rejoint la route du Pas du Mortier un peu au-dessus de Montaud, à environ 800 mètres d’altitude (1 heure et demie de marche depuis Ezy).Arrivé là, on peut descendre à Montaud, et ensuite rejoindre la vallée de l’Isère à Veurey, si l’on va à Grenoble, ou bien prendre l’autre route et filer sur Saint-Quentin si l’on va vers le Nord ou l’Ouest. Mais, si on a le temps, il est préférable de continuer la route du Pas du Mortier (1400 m), et descendre ensuite sur Autrans, un de ces villages les plus séduisants du Vercors, et devenu, à la faveur des Jeux Olympiques, une station bien équipée. .